Par Mansour M’HENNI
Le 10 décembre 2019, a été officiellement installée, par le professeur Denis Fadda, président international, la délégation de « La Renaissance Française » en Tunisie, fondée au premier semestre de l’année 2019, conformément aux lois en vigueur, notamment du décret-loi n° 2011-88 du 24 septembre 2011, portant organisation des associations en Tunisie, publié dans le JORT N°74 du 30 septembre 2011 (page 1978 et suivantes).
La délégation est présidée par le professeur Hédi Ben Mansour, alors Directeur de l’ISSAT-Mahdia (l’Institut supérieur des sciences appliquées et de la technologie de Mahdia – Université de Monastir). Le dossier officiel, dûment préparé et contrôlé par un huissier de justice, attend toujours l’autorisation lui permettant de publier, dans le JORT, l’information concernant la constitution de la délégation.
Cependant, un blocage, non avoué, semble retarder cette opération qui, conformément aux lois en vigueur (notamment du décret-loi n° 2011-88 du 24 septembre 2011), ne doit pas dépasser trente jours. Le président de la délégation a épuisé ses pieds, ses nerfs, et peut-être les pneus de sa voiture dans les déplacements, à ses frais, entre Mahdia et Tunis, pour s’enquérir de l’évolution du dossier. Mais, après son observation de toutes les modifications demandées, il est à chaque fois rassuré que dans une semaine au plus tard il recevrait un mail lui servant de justificatif pour la publication de l’annonce au JORT. Et voilà que ce mail ne vient toujours pas et que le président de la délégation ne sait plus à quel saint se vouer. Peut-être le changement du 25 juillet 2021, œuvrant à rétablir la primauté des lois et le respect des droits, conduira-t-il ce dossier à son issue logique.
Qu’est-ce que La Renaissance Française ?
C’est une association créée en 1915 par le président Raymond Poincaré. Les trois mots-clés de son objet sont actuellement : culture, solidarité et francophonie. Son slogan est « Promouvoir la culture, œuvrer pour la paix, distinguer les mérites ». Elle a plus d’une vingtaine de délégations dans toutes les régions de France ainsi que 35 délégations internationales sur quatre continents.
« Au XXIe siècle La Renaissance Française a pour objectif de faire rayonner la francophonie et ses valeurs humanistes partout dans le monde. Elle s’y emploie avec ses délégations en France et sur tous les continents. Ses centres d’intérêts sont vastes, avec pour point commun l’épanouissement culturel et l’accès au savoir – bases de l’enrichissement personnel, de la démocratie et des libertés. Par ses médailles et diplômes, elle offre à toutes les personnes engagées dans l’action au service du bien commun la reconnaissance de leurs mérites. »
Qu’est-ce qui, dans tout cela, justifierait le blocage de son dossier de délégation en Tunisie, quand nous savons que de nombreuses associations internationales sont dûment et chichement représentées en Tunisie, malgré toutes les réserves que plusieurs gens trouveraient pour s’opposer à leur représentation ?
Nous ne voulons pas prendre parti pour les uns ou pour les autres, nous nous contentons de soulever un problème d’application des lois en vigueur. De ce point de vue, la délégation tunisienne de La Renaissance Française est installée de fait, en référence à la loi. Après une dernière vérification avec le Secrétariat général du gouvernement (Direction générale des associations) et en cas de récidive d’obstruction à la finalisation des procédures administratives, son comité de direction a tout intérêt de recourir au tribunal administratif pour faire valoir ses droits.
A première vue, il y aurait deux explications plausibles :
1 – Il est possible que les responsables administratifs du secrétariat général du gouvernement aient cherché à s’éviter toute initiative leur paraissant à même de mécontenter les détenteurs du pouvoir pour des raisons politiques ou idéologiques, choisissant donc de faire trainer le dossier jusqu’à la lassitude de ses initiateurs ou jusqu’au changement de la situation gouvernementale. N’oublions pas que, avant le 25 juillet 2021, le secrétaire général du gouvernement était proposé pour le poste de ministre de l’Intérieur dans le remaniement ministériel non accepté par le Président de la République.
2 – Sachant bien que le parti En Nahdha détenait les rênes du pouvoir à tous ses niveaux administratifs, il y aurait de sa part une opposition ferme, d’un point de vue idéologique, à accepter que quiconque s’attribue un quelconque esprit de renaissance (de Nahdha). Nous savons que les responsables de ce parti-mouvement ont tout fait pour essayer d’occulter la Nahdha arabo musulmane et que le nom qu’ils se sont donné (En Nahdha) cherchait à se substituer au premier (la Nahdha) qui n’est pas sans parenté intellectuelle avec la notion de Renaissance, d’abord dans la civilisation arabo-musulmane du moyen-Âge, puis en Europe et surtout en France, dans la logique du progrès de la pensée rationnelle. Il semble même que depuis l’initiation de ce dossier, En Nahdha ait inscrit en français, sur certaines des banderoles de ses rencontres, le mot français « Renaissance » (au lieu d’En Nahdha), comme pour dire : « La Renaissance, c’est nous, la Renaissance, c’est moi, et moi seulement, En Nahdha ».
Tout espoir est permis, aujourd’hui, que l’administration Kaïs Saïed rétablisse l’esprit des lois et le respect des droits. Il y va de toute la philosophie attendue et déclarée du changement du 25 juillet 2021, un mouvement qui a tout le droit de se réclamer de la renaissance de l’Etat de droit. Sans parler de ce qui s’en suit en matière d’interaction culturelle avec les autres peuples et les autres civilisations, dans l’échange constructif pour la paix et la solidarité internationales.
(Paru dans: jawharafm.net , dans voixdavenir.com , et dans le journal Le Temps (Tunisie), version papier)